Rencontre avec le duo complice de Franca Atelier. France Bocognani & Caroline Bartoli. Elles ont créé – presque par hasard – bien plus qu’un un atelier de céramique, une identité artistique qui leur ressemble et qui reflète à merveille leurs personnalités. Leur secret ? L’amitié qui les lie depuis plus de dix ans, sans aucun doute, leurs origines corses, leur amour pour Marseille, l’importance de préserver leur liberté et de prendre le temps.

Pouvez-vous évoquer vos études et votre parcours professionnel ?
France : Entre le dessin avec un bac A3 puis l’école d’architecture de Marseille et enfin la communication à l’école de journalisme… Rien ne me prédestiné à la céramique, il y a 7 ans j’ai passé un CAP de décoration sur céramique à Aubagne.
Caroline : J’ai débarqué sur Marseille à mes 17 ans pour passer mon Bac et enchaîné avec une licence en marketing international. Après cela je suis partie vivre une année à Toronto en rentrant j’ai intégré une école de commerce. J’ai d’abord travaillé dans l’événementiel pour ensuite travailler dans le marketing pour une marque automobile.

Comment est né votre désir de devenir céramiste ?
Caroline : Nous n’avions pas du tout prévu de devenir un jour céramiste, nous sommes amies avec France depuis 10 ans, nous avons beaucoup de centres d’intérêts en commun et nous sommes l’une et l’autre assez manuelles ! Il y a bientôt 6 ans un ami nous a offert des cours de céramique avec sa maman Maggy Champsaur qui était une grande céramiste Marseillaise. De ces quelques cours tout s’est enchaîné, France a été diplômée de l’école de Céramique d’Aubagne en décoration sur céramique, moi j’ai continué à prendre des cours du soir avec Maggy et un jour Franca est naît grâce a une amie de France qui souhaitait lui commander des assiettes pour son restaurant. De là, l’idée a germé et nous avons décidé de nous lancer !

Est ce que l’art, l’artisanat occupait une place importante dans vos familles ?
Caroline : Ma maman est très manuelle, elle m’a appris le tricot, la broderie, le canvas, le tissage.. Dès que j’ai envie de tester une nouvelle activité, je l’appelle pour qu’elle me montre comment procéder car elle a souvent tous les outils nécessaires.
France : Pas vraiment, mais je viens d’un milieu paysan. J’ai passé du temps en Corse dans le village de mon père au contact de la nature, du fait main, de la fabrication artisanale du vin, du fromage, des meubles, des murs en pierres sèches et je suis sensible à ce mode de vie. M’enrichir financièrement ne m’intéresse pas, je veux surtout être heureuse et prendre le temps; le seul luxe.

« A Marseille, il n’y a pas de juste milieu. Marseille c’est la beauté ! L’architecture des cabanons, les immeubles Haussmannien, la Corniche, la Joliette, l’Estaque, c’est 111 villages, le mélange des cultures, un port magnifique, les calanques… mais aussi la pauvreté, la violence, la saleté… J’aime ses paradoxes, ses contrastes, c’est ce qui fait son grand charme. » France

Quels ont été vos tous premiers ressentis la première fois que vous avez découvert Marseille ?
France : J’y suis née, comme beaucoup de Corse dans les années 70. Les femmes préféraient accoucher sur le continent. Je me sens comme une métisse, à Marseille je suis une Corse et en Corse je suis une marseillaise.
Caroline : Je n’étais qu’une petite fille lorsque j’ai découvert Marseille, mon grand-père était un grand supporter de l’OM. Dès qu’on quittait notre île pour quelques jours dans la cité phocéenne, c’était en fonction du calendrier du Vélodrome, car il en profitait pour aller voir un match ! Mes seuls vrais souvenirs de petite fille étaient fait de passion, de démesure, de chants, la ferveur olympienne ! En 2007, j’ai décidé de quitter Ajaccio pour venir y faire mes études ! mon objectif premier était de découvrir une autre ville, plus grande qu’Ajaccio, une autre mentalité, de nouvelles personnes et de nouveaux horizons, mais le seul impératif était d’avoir du soleil chaque jour ! Je n’aurais pas pu quitter Ajaccio pour Paris. Marseille était très différente d’aujourd’hui, le TGV, n’était pas encore installé, l’année 2013 et sa sélection en tant que Capitale Européenne de la Culture a changé beaucoup de choses ! Marseille est devenue ma ville d’adoption, j’adore mon île, j’apprécie d’y rentrer pour me reposer, me ressourcer, retrouver ma famille et mes amis mais Marseille j’y vieillirais je pense, même si la qualité de vie n’y est pas aussi douce qu’en Corse.
Qu’est ce que Marseille a de différent ? Les rencontres, la lumière, la vibe ..?
France : Marseille c’est le bon compromis quand on vient de Corse, c’est la grande ville au bord de l’eau. Les gens sont haut en couleurs et j’adore ça, j’aime les contrastes, dîner entre un avocat, une chanteuse, une grande bourgeoise et le dealer du coin. C’est l’entre soi des renégats, le mélange des genres, on ne s’y ennuie jamais.
Caroline : Marseille est unique, intense, on l’aime ou on l’a déteste, il faut savoir l’appréhender, ne pas vouloir la changer. La lumière y est très spéciale, elle sublime le moindre élément quel qu’il soit !

« Provisions, est notre cantine préférée à deux pas de l’atelier. La relève du déjeuner à l’apéro est un peu comme notre seconde maison. L’Atelier Renata pour un voyage direct en Italie chez notre amie Erika. Ivresse pour une sélection de vins des 4 coins du monde et une cuisine raffinée dans un lieu inattendu à côté de chez France. Razzia pas loin de l’atelier, Nguyen-Hoang pour ses BoBun de folie. L’idéal & la Mercerie à Noailles, sont nos valeurs sûres. «


Si vous pouvez aussi me parler de vous, de ce que vous aimez, de votre amour pour votre travail, de vos projets et rêves…
France : Ce que je préfère dans notre travail pour Franca, c’est le dessin, la décoration, le scrafitage, les empreintes, puis l’émaillage, la couleur… ça tombe bien Caroline est bien meilleure en modelage et création pure de pièces, elle est la seule à pouvoir reproduire nos pièces, il n’y aurait pas de série sans elle… Elle est organisée, méticuleuse, vraiment douée, très efficace et créative. Je suis plus éparpillée et fantasque… on est complémentaire.
Caroline : La Céramique est infinie, Maggy notre prof disait qu’il lui faudrait trois vies pour pouvoir découvrir toutes les techniques, car il y a autant de techniques que de céramistes. Elle avait complètement raison ! Après plus de 5 années à mettre les mains dans la terre, notre travail évolue on a envie d’approfondir de nouvelles choses. La terre nous permet de lâcher complètement prise, elle a des bienfaits uniques que d’autres matériaux n’ont pas. Nous ne savons pas trop (et n’avons pas envie de savoir) où nous serons dans 5 ou 10 ans, nous apprécions chaque jour cette aventure imprévue !